Vaincre les freins & réticences des experts

Lors des expertises d’assurance ou expertises judiciaires, l’indemnisation réclamée par l’entreprise sinistrée représente un coût pour l’assureur. Elle repose sur des intérêts en opposition entre la victime et un assureur plus parfois un tiers fautif qui peut lui-même être en conflit avec son propre assureur du fait des exclusions de son contrat d’assurance. C’est l’expert d’assurance qui s’efforcera de s’y opposer et/ou de la minimiser. Ainsi, l’indemnisation d’un préjudice est par nature conflictuelle avec parfois avec des échanges vifs, mais le plus souvent le conflit reste sous-jacent.

Lors de la réclamation d’un indemnisation à l’assureur d’un tiers fautif, souvent, le conflit d’intérêt peut aussi opposer l’assureur à son assuré notamment lorsque l’assureur conteste l’application de la garantie contractuelle.

Les arguments des experts d’assurance confinent généralement en mauvaise foi, citons quelques exemples :

  • pour tenter de minimiser le chiffre d’affaires perdu
    « L’effet de la crise économique »
     » L’absence d’un « business plan prévisionnel »
  • en présence de nouveaux investissements qui permettent d’augmenter le volume des ventes
    « Augmenter la capacité de production est une chose mais avoir les commandes suffisantes … en est une autre »
    « Il n’a pas été communiqué d’éléments … des clients de l’entreprise qui justifie une augmentation des besoins »
    « Aucun compte rendu de réunion avec des clients évoquant un prévisionnel à la hausse … »
  • en présence de statistiques professionnelles montrant une croissance du marché
    « La comparaison de l’évolution du chiffre d’affaires de l’entreprise par rapport au reste de la profession est discutable compte tenu du créneau « de niche » sur lequel elle intervient « 
  • en réclamant une diminution de l’indemnisation en évoquant des économies en plus de celles déjà intégrées dans la marge sur coûts variables
    « l’entreprise a subi des économies de certaines charges … »
    Certes dans quelques rares cas d’évaluation de perte d’exploitation, quelques économies peuvent apparaître mais elles restent très limitées principalement du personnel intérimaire devenu inutile et des locations de matériels, sous réserve que le contrat permette une telle résiliation.
  • en tentant d’imputer à la victime une partie de responsabilité dans le coût du sinistre
    « la direction aurait dû prendre des mesures pour éviter une aggravation du sinistre … »
    « Les ventes auraient pu reprendre plus tôt… »
    Cela qui est contraire à la jurisprudence. L’obligation pour la victime de limiter son dommage (appelé mitigation) n’est pas reconnu par la Cour de cassation que ce soit en responsabilité contractuelle ou délictuelle. Mais, il faut l’indiquer à l’expert judiciaire au risque qu’il soit convaincu que la victime porte une part de responsabilité.
  • en tentant d’accrédité que le sinistre est terminé avec l’arrivée des nouvelles machines ou de réfection d’un bâtiment
  • en tentant de nier l’indemnisation de la perte future lorsque l’entreprise n’a pas encore atteint le niveau du chiffre d’affaires attendu … alors que la communication de la Cours de cassation (BICC n° 781) indique « La condition de certitude vise d’abord les préjudices actuels. Mais la jurisprudence admet aussi la prise en compte des préjudices futurs, pourvu que leur réalisation soit suffisamment probable et non hypothétique« .
  • … etc.

Lors des expertises on note souvent les hésitations des experts-judiciaires ou de leurs sapiteurs expert-comptable judiciaire

Les experts judiciaires dévoilent rarement leur position définitive avant de rendre leur rapport, raison pour laquelle un (des) dire sérieusement argumenté doit leur être adressé
– d’une part si on entrevoie son désaccord avec la réclamation
– d’autre part et surtout pour réaffirmer l’argumentation favorable et contredire ceux l’expert d’assurance.
Ainsi, comme le précise une publication de l’APSAD (Assemblée permanente des sociétés d’assurances dommages dans « notions juridiques utiles à l’expertise des sinistres responsabilités civiles »)

« … la preuve s’apporte par un jeu dynamique d’arguments et de contre arguments techniques et que le débat sera en définitive gagné par celui qui aura apporté au moment opportun l’argument le plus pertinent ».